Tripoli accueille, ce mercredi 17 juillet, un Forum international sur la migration en Méditerranée. La Libye, qui se considère comme une victime de ce phénomène, sert de passage pour tous les migrants subsahariens en route vers l'Europe.
Des dizaines de milliers d'entre eux attendent des années sur le territoire libyen pour tenter de traverser la Méditerranée. Des accords avec l'Italie et l'Union européenne imposent à la Libye et à la Tunisie d'intercepter les migrants, mais la Libye semble décidée à ne plus jouer ce rôle sans nouvelles contreparties.
En amont de ce Forum, Imad Trabelsi, le ministre de l'Intérieur du gouvernement de Tripoli, a lancé l'alerte en déclarant que la Libye abriterait 2,5 millions d'étrangers, soit l'équivalent d'un tiers de la population libyenne. Selon lui, 70% à 80% de ces migrants ne sont pas en règle, une estimation bien au-delà de celle donnée par les Nations unies.
Ce matin, le ministre de l'Intérieur a réitéré ses propos en refusant l'installation de ces migrants en Libye. Sur la télévision saoudienne Al Hadath, il a exprimé le souhait que l'Europe « se mette aux côtés des Libyens » dans ce dossier qui touche la sécurité nationale.
La Libye, destination majeure des migrants et des réfugiés cherchant à traverser la Méditerranée, est devenue un paradis pour les passeurs et les trafiquants profitant de l'instabilité qui règne depuis 2011. Interceptés en mer par les autorités libyennes financées par l'UE, les migrants subissent dans des centres de rétention légaux ou illégaux des « violations flagrantes et généralisées perpétrées à grande échelle », selon l'ONU.
Tripoli cherche à engager davantage la responsabilité de l'UE
En organisant ce Forum, Tripoli cherche à engager davantage la responsabilité de l'UE sur cette question. Selon le politologue François Gemenne, spécialiste des questions de migrations, ce pays cherche à obtenir « davantage de financements et à ce que l'UE ferme les yeux sur les mauvais traitements et les droits humains des migrants dans le pays. »
Selon le chercheur, l'UE, qui sous-traite le problème à la Libye et à la Tunisie, bien qu'elle soit au courant des maltraitances subies par les migrants, prendra des mesures encore plus restrictives pour la fermeture de ses frontières. Quant à la Libye, elle joue sur deux tableaux : se plaignant du nombre de migrants présents sur son territoire, tout en demandant de l'aide et des financements pour les retenir en Libye.
Onze premiers ministres des pays européens ou voisins de la Libye sont attendus à ce Forum qui aura lieu à l'hôtel Rixos à Tripoli. Des ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur des pays impliqués seront également présents. Le Tchad est représenté par son président Mahamat Déby, qui est sur place depuis hier.