Transformer les impressionnantes performances économiques des dix dernières années en progrès encore plus importants sur la voie de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) demeure l'un des objectifs principaux de l'Afrique, selon un nouveau rapport.
Publié le 27 mai à Addis-Abeba, le Rapport 2013 sur les OMD, intitulé Évaluer les progrès de l'Afrique vers la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, conclut que, bien que l'Afrique soit la deuxième région du monde en termes de croissance, son taux de réduction de la pauvreté ne suffira pas à diminuer de moitié l'extrême pauvreté d'ici à 2015.
Élaboré conjointement par la Commission de l'Union africaine (CUA), la Commission économique de l'ONU pour l'Afrique (CEA), le Programme de développement des Nations unies (PNUD), et le Groupe de la Banque africaine de développement (BAD), le rapport d'étape a été publié le dernier jour du Sommet de l'Union africaine.
Une analyse de l'insécurité alimentaire - le thème du rapport - permet de comprendre la façon dont ce phénomène affecte d'autres OMD, notamment les objectifs relatifs à la santé, et comment des efforts concertés visant à améliorer l'agriculture, la distribution alimentaire et la nutrition permettraient d'accélérer les progrès vers la réalisation des OMD.
Le rapport révèle que les chocs climatiques, qui se traduisent par des conditions météorologiques extrêmes, ont détruit les moyens de subsistance et aggravé l'insécurité alimentaire en Afrique, entraînant des taux élevés d'enfants souffrant d'insuffisance pondérale, de famine généralisée et de mauvaises habitudes alimentaires.
À moins de 1 000 jours de la date butoir pour la réalisation des OMD en 2015, le rapport dresse l'état des lieux des performances générales de l'Afrique, recensant les pays les plus performants par indicateur, basé sur les progrès réalisés au vu des conditions initiales respectives dans chacun d'eux.
En 2012, à l'échelle mondiale, 15 des 20 pays qui ont enregistré les plus forts progrès se trouvaient en Afrique. Des pays tels que le Bénin, l'Égypte, l'Éthiopie, la Gambie, le Malawi et le Rwanda accomplissent des progrès impressionnants sur un certain nombre d'objectifs et de cibles.
Le rapport conclut qu'il est impératif que les pays continuent d'apprendre les uns des autres, d'autant que ceux qui ont connu une croissance équitable, en même temps qu'une stabilité politique et l'adoption de politiques axées sur le développement humain, obtiennent de bons résultats quant à la plupart des objectifs.
Quatre objectifs sont jugés "en bonne voie" et quatre autre "à la traîne" :
"En bonne voie" : OMD 2 - Réaliser l'éducation primaire universelle ; OMD 3 - Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes ; OMD 6 - Combattre le VIH/sida, la tuberculose le paludisme, et d'autres maladies ; OMD 8 - Établir un partenariat mondial en faveur du développement.
"À la traîne" : OMD 1 - Éliminer la pauvreté et la faim extrêmes ; OMD 4 - Réduire la mortalité infantile ; OMD 5 - Améliorer la santé maternelle ; et OMD 7 - Assurer la viabilité environnementale. Toutefois, certains pays ont enregistré des progrès non négligeables.
Qui plus est, le rapport indique que l'Afrique doit mettre en place des structures pour maintenir son développement bien au-delà de l'échéance des OMD.
« Nous espérons que ce rapport encouragera les États membres à redoubler d'efforts pour la réalisation des OMD.
En outre, nous préconisons que le programme de développement pour l'après-2015 tienne compte des conditions initiales des États-nations, et qu'il reconnaisse les efforts que ceux-ci déploient pour atteindre ces objectifs, au lieu de se contenter de mesurer l'écart qui les en sépare », indique la préface du rapport, co-signée par le président de la CUA, Nkosazana Dlamini Zuma ; le secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique (CENUA), Carlos Lopes ; le président de la Banque africaine de développement, Donald Kaberuka; et l'administrateur du PNUD, Helen Clark.
« L'Afrique doit s'engager en faveur d'un développement inclusif, axé sur la transformation, qui réduise la pauvreté liée au revenu, les inégalités, créé des emplois décents, élargisse l'accès aux services sociaux, et promeuve la résistance aux catastrophes climatiques », poursuit la préface.
Le rapport aborde un grand nombre de questions, esquisse des recommandations politiques, et met en lumière toute une gamme de succès, de défis, d'innovations et d'obstacles.
OMD aux progrès accélérés :
L'accès à l'école primaire est en train de devenir la norme, mais la qualité de l'enseignement demeure un défi - la plupart des pays africains sont parvenus à assurer une scolarisation primaire universelle, avec des taux d'inscription supérieurs à 90 %, mais c'est tout le continent qui doit atteindre l'OMD 2. Les programmes alimentaires scolaires et l'accès aux établissements préscolaires ont fortement contribué à ces progrès.
Encourager les progrès en vue l'égalité des sexes - Les femmes sont en train de gagner en autonomisation sur l'ensemble du continent africain, davantage de filles fréquentant les écoles primaires et secondaires, et davantage de femmes accédant au pouvoir politique. Mais des pratiques culturelles telles que le mariage précoce et les maigres perspectives économiques des femmes ralentissent les progrès.
L'Afrique a mis fin à la propagation du VIH/sida, de la tuberculose et du paludisme - grâce à un leadership politique fort, des interventions ciblées, à un accès élargi aux médicaments de traitement du sida, à de meilleurs efforts de prévention et de meilleurs traitements contre la tuberculose et le paludisme.
Principaux défis :
Les taux de famine et de malnutrition demeurent élevés en Afrique, en particulier chez les enfants - En 2012, l'Indice de la faim dans le monde montrait que la majeure partie de l'Afrique connaissait des taux élevés, sinon alarmants, de famine. L'insécurité alimentaire a fortement joué sur le ralentissement des progrès en matière d'OMD relatifs à la santé, celle des enfants et des mères notamment. Les changements climatiques, l'instabilité politique et l'explosion de la croissance démographique figurent au nombre des facteurs qui contribuent à ce ralentissement. La population du continent croît si vite, que certains pays pourraient ne plus être en mesure de produire toute la nourriture dont ils ont besoin.
L'Afrique est le continent le plus durement touché par la mortalité infantile et maternelle, malgré des progrès significatifs - Les décès des enfants de moins de cinq ans ont baissé de 47 % sur tout le continent africain entre 1990 et 2011. Pour accélérer les avancées, le rapport de cette année sur les OMD met en lumière l'importance des interventions sanitaires intégrées en faveur des mères et des enfants, en mettant l'accent sur la mortalité infantile et la nécessité de mener des politiques intégrées qui s'attaquent aux causes des décès maternels et infantiles.
Dans l'ensemble, la contribution de l'Afrique au commerce mondial a peu évolué, stagnant autour de 3 % environ - La part des importations de l'Afrique vers les pays développés (certes, en franchise de droits) a généralement stagné pour la plupart des pays, mais elle a augmenté de plus de 50 % dans 14 pays africains.
Les moyens de subsistance de quantité de foyers africains seront mis en péril, si des efforts ne sont pas entrepris pour améliorer la résistance aux catastrophes environnementales - y compris celles qui sont attribuables aux changements climatiques. Pour poursuivre les avancées en matière d'OMD, il faut renforcer les capacités d'anticipation et de réponse aux catastrophes climatiques et capitaliser sur les nouvelles perspectives de croissance verte.
La plupart des pays africains peinent à atteindre les objectifs fixés dans l'eau et l'assainissement - Ils doivent concentrer leurs efforts sur les zones rurales et les groupes à faibles revenus, car les disparités d'accès aux revenus entre les zones urbaines et rurales ralentissent les progrès dans la plupart des pays.
Recommandations politiques essentielles :
Si, l'Afrique dans son ensemble obtient de bons résultats en matière de réduction des émissions de dioxide de carbone et de substances qui appauvrissent la couche d'ozone, néanmoins la couverture forestière est en baisse. Les gouvernements africains doivent adopter des stratégies et des programmes de reforestation.
Les gouvernements africains doivent constamment repousser les frontières de la productivité agricole, grâce notamment à des politiques qui appuient l'exploitation des connaissances locales, les investissements en infrastructures et le développement des marchés financiers.
Accélérer la création d'emplois décents nécessitera des changements politiques audacieux, qui promeuvent des activités à valeur ajoutée, la diversification économique et les investissements dans les infrastructures.
Le rapport soutient que les décideurs politiques doivent poursuivre des stratégies de croissance inclusive qui promeuvent une large participation de la population active, tout en veillant à ce que les rendements soient investis dans des programmes qui renforcent les capacités productives de larges pans de la société - femmes, jeunes et personnes vulnérables notamment.
Pour que l'agriculture africaine permette d'améliorer les moyens de subsistance et l'autonomisation économique, les gouvernements africains doivent continuer d'accroître leur productivité agricole, grâce à de meilleures politiques et des investissements plus importants dans les semis améliorés, l'agriculture irriguée, l'utilisation d'engrais et un meilleur accès à la finance.