Quelle est la meilleure manière d'assurer une transition démographique pertinente, une qualification et une création d'emploi en faveur des jeunes avec en plus un dividende technologique. C'est à cette équation qu'ont voulu répondre, au deuxième jour des Assemblées annuelles de la BAD à Kigali, les membres du Panel de haut niveau sur « Comment tirer parti de la jeunesse de l'Afrique (en anglais, Cashing in on the Demographic Dividend) »
Pour ce faire, la première donnée à intégrer est qu'«aucun investissement n'est pertinent, voire possible sans capital humain bien formé. » Ce constat est d'autant plus crucial pour le devenir de l'Afrique qu'avec un milliard de jeunes (moins de 35 ans) aujourd'hui et 2,5 milliards en 2050, n'a pas d'autre choix que de prendre le mal de leur sous-emploi par la racine, c'est-à-dire, l'absence de formation et l'éducation de base. Avec de tels chiffres, «l'Afrique dispose d'un milliard d'opportunités, pour transformer le paysage du capital humain en Afrique, » ont souligné dans une déclaration commune, Agnès Soucat, directrice du développement humain de la BAD et Mthuli Ncube, économiste en chef de l'institution.
Le dividende démographique que doit cibler le continent est « le gain de croissance que l'on peut obtenir du fait d'une meilleure structuration de la population, en maîtrisant par exemple, la transition démographique » (en fonction du nombre d'enfants par femme) mais en ayant une adéquation entre la baisse du taux de mortalité et une baisse du taux de natalité. Cet acquis obtenu, l'autre étape consistera à engager au-delà du planning familial, d'autres politiques, notamment en matière d'éducation. Dans ce domaine, une des pistes à explorer est la gratuité de la scolarisation des jeunes filles, pour promouvoir le genre, en maintenant celles-ci à l'école afin d'éviter des maternités précoces. Certains participants ont souligné que «ne pas avoir la volonté d'investir dans les filles, c'est tout simplement renoncer au développement »
Il s'agit par exemple d'assurer une éducation de qualité. Ceci suppose, pour les intervenants aux travaux, «opérer une démarche holistique tout en dégageant des priorités en fonction des besoins de chaque pays en matière d'ingénierie, de sciences sociales et de technologie. »
A cet égard, la notion de formation technique ne doit plus être dévalorisée, mais au contraire repensée à l'instar de ce qui se fait dans des pays de référence dans ce domaine, à partir de leçons tirées. L'Afrique pourra ainsi éviter le piège de l'antinomie formation technique dévaluée et formation universitaire mieux rémunérée. Le déclin de certains métiers artisanaux pourtant porteurs de croissance s'en trouve ainsi expliqué.
Le Continent est ainsi à la croisée des chemins : soit voir en ces jeunes et leur nombre, un atout en leur procurant des emplois, en recueillant des facteurs de croissance ; ou bien les percevoir comme un boulet et les exclure, sans emploi, avec toute la violence que cela comporterait.
La nécessité d'une prise de conscience pourrait simplement se résumer à deux chiffres : 64 milliards de dollars illicites en fuite de capitaux et 4 milliards de dollars en investissement pour le recrutement de professionnels étrangers dont l'utilité n'est pas discutée, mais tant de fuite de cerveaux et d'embarcations remplies de jeunes qui s'échouent sur des côtes mirifiques d'Europe.