« L'Afrique se développera selon ses propres conditions, sans compter sur la bienveillance d'autrui. C'est la seule et unique façon d'accélérer le développement et de le focaliser sur les nos besoins, poussé par un profond sentiment d'urgence et de responsabilité ». Tels étaient les propos du président du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, lorsqu'il prononçait, le lundi 27 mars 2017 à Abidjan, un discours liminaire dans le cadre de la conférence sur les marchés émergents, organisée par le gouvernement de la Côte d'Ivoire.
Plus de 300 participants sont venus des quatre coins de la planète, écouter le président Adesina s'exprimer sur le thème « Africa, forty years from now » (l'Afrique dans quarante ans), lors d'une session du Forum des marchés émergents 2017. Parmi eux figuraient d'éminents chefs d'entreprise, des représentants gouvernementaux, des décideurs financiers, ainsi que des représentants des secteurs public et privé les plus influents du continent africain.
Adesina a déclaré préférer parler de la promesse de l'Afrique de se transformer dans les dix prochaines années, période correspondant à celle des Cinq grandes priorités de développement (Top 5) de la BAD - à savoir éclairer l'Afrique et l'alimenter en énergie, nourrir l'Afrique, industrialiser l'Afrique, intégrer l'Afrique et améliorer la qualité de vie des populations en Afrique - plutôt que d'imaginer le continent dans 40 ans. «D'ici une quarantaine d'années, le monde aura totalement changé », a-t-il dit, faisant remarquer que « l'avenir de l'Afrique est toujours remis à plus tard. Avant, on parlait de l'horizon 2020, et aujourd'hui, on parle de l'horizon 2063. Je parlerai plutôt de la promesse de l'Afrique de se transformer dans les dix prochaines années, soit la durée prévue des Cinq grandes priorités (Top 5) ».
Dans cette perspective, le président Adesina souligne que l'Afrique ne pouvait pas continuer à se développer dans le noir. Les Africains en ont assez d'être dans l'obscurité. Rien ne peut s'accomplir en matière d'éducation, de santé et de divertissement lorsque les populations n'ont pas accès à l'électricité. « Environ 645 millions de personnes n'ont pas accès à l'électricité en Afrique. L'électricité doit figurer en tête de liste des priorités de chacun », dira Adesina.
Pour venir à bout de ce problème, il explique que le Groupe de la BAD s'est engagé à investir 12 milliards de dollars EU dans le secteur de l'énergie de l'Afrique au cours des cinq prochaines années. « Nous espérons également mobiliser 45 à 50 milliards de dollars EU pour cofinancer des projets énergétiques dans la région au cours de cette même période.»
«L'avenir, c'est maintenant. L'avenir s'ouvre déjà à nous. L'Afrique attend d'être bâtie aujourd'hui. Mais rien de tout cela ne sera possible sans stabilité politique et sans communautés stables et pacifiques,» a déclaré Adesina.
Le continent doit également libérer son énorme potentiel agricole et mettre l'accent sur l'industrialisation, a-t-il ajouté, faisant remarquer que les gouvernements devront prendre des mesures importantes dans les années à venir. « Ces 40 dernières années ont montré que l'Afrique ne parvenait pas à se nourrir. Les 40 prochaines montreront qu'elle en est capable, et qu'elle le fera. L'Afrique deviendra alors une puissance mondiale incontournable dans les secteurs de la production et de la transformation alimentaire.»
Pour que le continent soit en mesure de nourrir sa propre population de 2 milliards d'individus, ainsi que les 7 autres milliards dans le reste du monde, Adesina souligne la nécessité de prendre des mesures courageuses au cours des dix prochaines années.
Pour y parvenir, la BAD s'est engagée à faire de l'agriculture et de l'agro-industrialisation un facteur de transformation du continent en l'aidant à se hisser au sommet des chaînes de valeur agricoles. Le président de la BAD a également évoqué la nécessité de préparer les jeunes du continent aux métiers de demain, en mettant l'accent sur la maîtrise du numérique, l'informatique, l'ingénierie, les sciences des matériaux et la biotechnologie. «Tels sont les principaux efforts requis pour accélérer l'industrialisation du continent,» a observé le président Adesina, précisant que «la BAD a pour ambition de contribuer à doubler le PIB industriel des économies africaines pour atteindre 1720 milliards de dollars EU d'ici 2025, soit 30 % du PIB global.»
Concluant ses propos, M. Adesina a indiqué que les choix de l'Afrique ainsi que la volonté politique affirmée des gouvernements du continent, ainsi que le leadership que ceux-ci seront en mesure de démontrer pour prendre les bonnes décisions, détermineront ce que l'avenir réserve à chacun des pays.
«Néanmoins, ne pensons pas à l'Afrique dans 40 ans. Pensons à l'Afrique dans 10 ans, car elle attend depuis trop longtemps.»
Entre autres participants, la rencontre a enregistré la présence de la ministre du plan et du développement de la Côte d'Ivoire, Nialé Kaba ; le ministre du plan et du développement du Bénin, Abdoulaye Bio Tchané ; l'ancien directeur général du FMI, Michel Camdessus ; le gouverneur de la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest Koné Tiemoko Meyliet ; et le directeur général du Forum des marchés émergents, Harinder Kohli.
Lire le texte intégral du discours : http://bit.ly/2o3rZn9