Celles et ceux qui se sont déjà rendus au Rwanda, ont forcément entendu parler de l'Umuganda, cette vaste opération de nettoyage qui a lieu le dernier samedi de chaque mois. Le pays a gagné une reconnaissance mondiale avec cette initiative civique transformatrice. Le terme Umuganda signifie « poursuivre ensemble un objectif commun pour engranger des résultats».
C'est précisément ce qu'entend faire la 13e Conférence économique africaine (AEC), qui se déroulera à Kigali du 3 au 5 décembre 2018. Réunissant des groupes de réflexion (think tanks), chercheurs, décideurs et dirigeants des secteurs public et privé d'Afrique ainsi que des représentants des organisations économiques régionales, cette rencontre vise résolument à propulser le programme d'intégration de l'Afrique vers de nouveaux sommets.
La Conférence se tient, neuf mois seulement après que les dirigeants africains aient signé l'accord établissant la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA), la plus importante depuis la création de l'Organisation mondiale du commerce, une étape tout aussi marquante.
La ZLECA rassemble les 55 États membres de l'Union africaine, soit tous les pays du continent. Il s'agit d'un marché global de plus de 1,2 milliard de personnes, susceptible de provoquer à terme une gigantesque transformation du commerce intracontinental.
La Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (UNECA) estime que la ZLECA pourrait stimuler le commerce intra-africain en supprimant les droits à l'importation et pourrait même le doubler, dans l'hypothèse où les obstacles non tarifaires sont également réduits. Cela permettrait de porter le taux actuel du commerce intra-africain de 15 % à 52,3 % - comparativement à 54 % dans la Zone de libre-échange nord-américaine, 70 % au sein de l'Union européenne et 60 % en Asie.
Le thème de l'AEC 2018 - « L'intégration régionale et continentale au service du développement de l'Afrique » - est bien en conformité avec la stratégie du Groupe de la Banque africaine de développement, qui vise à promouvoir une croissance forte, partagée et durable en Afrique. Les partenaires organisateurs expliquent que la conférence de cette année sera pragmatique dans sa recherche de solutions pratiques pour faire progresser le programme d'intégration régionale du continent, en particulier la mise en œuvre de la ZLECA.
Les défis qui se posent à l'Afrique sont bien connus, raison pour laquelle le Groupe de la Banque africaine de développement a fait de l'Intégration de l'Afrique l'une des cinq priorités (High 5) de son programme de développement.
«Notre vision porte sur la construction d'un continent stable, intégré et prospère regroupant des pays compétitifs, diversifiés, dotés d'une économie durable et participant pleinement aux échanges et aux investissements mondiaux,» a souligné le président de la Banque, Akinwumi Adesina.
Ces trois dernières années, la Banque a financé des projets estimés à 1,3 milliard de dollars EU et des biens publics régionaux d'une valeur de 187,6 millions de dollars EU. La politique de la Banque vise à s'assurer que 10 % du budget de tous les projets régionaux soient alloués à des interventions en faveur d'infrastructures immatérielles.
Dans le cadre de sa mission, le Groupe de la Banque africaine de développement continue de piloter plusieurs initiatives continentales ciblant les infrastructures tant matérielles qu'immatérielles (A titre d'exemple, des politiques et instruments de facilitation du commerce et des services). Ces initiatives comprennent le Programme intégré de développement de l'agriculture en Afrique (CAADP), le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) et le plan d'action pour stimuler le commerce intra-africain.
Le Groupe de la Banque africaine de développement continuera de soutenir et d'intensifier les initiatives transformatrices visant à stimuler l'intégration régionale. Dans cette dynamique, l'institution s'engage également à travailler avec les différentes parties prenantes. Les Communautés économiques régionales (CER) ont besoin de soutien pour mettre en place des infrastructures immatérielles, harmoniser les investissements et les codes en matière d'ingénierie et garantir des normes de qualité et de certification.
«Il est impératif de saisir l'opportunité pour appeler toutes les parties prenantes à l'AEC qui se tient à Kigali, à creuser en profondeur et à trouver des solutions pertinentes et efficaces qui dirigeront et orienteront nos futures actions,» a affirmé, pour sa part, Moono Mupotola, directrice de l'Intégration régionale à la Banque africaine de développement.
L'un des moments forts de la conférence sera la présentation du rapport phare de la Banque, intitulé : Indice d'ouverture sur les visas 2018. L'Afrique, et avec elle l'ensemble de la communauté internationale, attend d'importants résultats démontrant le chemin parcouru dans le cadre de ce processus.
Les attentes de la Banque sont grandes : que les experts régionaux identifient les meilleurs moyens d'accélérer l'intégration de l'Afrique. Pour y arriver, il est essentiel d'avancer rapidement avec efficacité, et juguler les questions de volonté politique et de l'harmonisation des législations et des barrières non tarifaires.
Dans cette optique, la Banque demeure convaincue que la coopération avec les CER représente la voie la plus directe pour réunir les 55 marchés africains fragmentés.
Et, tout comme pour l'Umuganda, la tâche peut s'avérer exigeante et difficile, mais si la communauté tout entière s'unit autour d'un objectif commun, la réalisation d'une plus grande intégration n'est plus très loin.
Comme le dit le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina : « Nous sommes à la tâche pour relever le défi et nous sommes sur la bonne voie ! »