Une session spéciale sur le mécanisme REDD+ était organisée, le 6 décembre 2018, au 4e jour de la COP24, au sein du Pavillon de la Banque africaine de développement.
07/12/2018
Le mécanisme de réduction des émissions de gaz à effet de serres issues de la déforestation et de la dégradation des forêts, dit REDD+, fête les dix ans de sa mise en œuvre en Afrique. L'occasion, pour la Banque africaine de développement, de réunir en son Pavillon, en pleine COP24 à Katowice, en Pologne, des experts venus de la République démocratique du Congo (RDC), du Burkina Faso, du Ghana, ou encore de la Côte-d'Ivoire pour une session dédiée. Un représentant de la société civile et un autre du Fonds vert pour le climat (GCF) étaient également présents.
La RDC concentre 10 % des forêts mondiales et 90 % des forêts de l'Afrique centrale. Mais la déforestation continue de gagner du terrain, voire de s'accélérer. De 2010 à 2014, la déforestation a ainsi progressé de 1,25 % en République démocratique du Congo - contre un taux de 0,25 % entre 2000 et 2010. Si la couverture forestière demeure encore importante, elle vit sous le péril de disparaître un jour, si rien n'est fait.
C'est là qu'intervient le mécanisme REDD+ qui permet de lutter contre la déforestation, tout en offrant une dimension économique potentiellement avantageuse pour les pays en voie de développement : la vente de crédit carbone.
« Il faut développer une politique prospective basée sur les moteurs directs et indirects de déforestation qui affectent les forêts », de l'avis de Victor Kabengele Wa Kadilu, coordinateur du fonds de mise en œuvre du mécanisme REDD+ en République démocratique du Congo.
Déforestation versus développement
Certaines pratiques agricoles comme la culture sur brûlis, ou encore la biomasse, sont des causes directes de déforestation, que peuvent aussi aggraver, de façon plus indirecte, les problèmes fonciers et la démographie en hausse. Les litiges fonciers sont d'ailleurs fort nombreux en RDC, aiguisés davantage encore par la dualité entre le droit coutumier et le droit civil. Quant à l'essor démographique, le population de RDC a crû de 3% ces quatre dernières années.
Comment inverser la tendance pour enrayer la déforestation ? Pour Victor Kabengele, il faut adopter une démarche qui transforme ces difficultés en moteurs de développement.
Ainsi de l'agroforesterie durable, qui permet de restaurer la santé du sol des zones défrichées et de préserver celles dont la couverture forestière est encore intacte.
Victor Kabengele suggère de proposer aux investisseurs de mettre en œuvre leurs projets dans les zones ayant subi une déforestation et non celles qui n'ont pas encore été affectées. Selon lui, cela permettra de créer un cercle vertueux et durable au plan économique, notamment en termes d'agroforesterie.
Une approche holistique et inclusive
Une approche holistique favoriserait une plus grande inclusion, de l'avis des panélistes réunis dans cette session, car elle contribuerait au succès de la mise en œuvre du mécanisme REDD+ en Afrique. C'est le cas, par exemple, en Côte-d'Ivoire, où les organisations de la société civile sont très actives et œuvrent ardemment pour cette approche inclusive.
Il s'agit surtout de pouvoir investir dans un environnement stable, de surveiller et d'encadrer la mise en œuvre des projets et de réduire les impacts négatifs des émissions de gaz à effet de serre. L'inclusion, quant à elle, requiert de prendre en considération les communautés locales et de les impliquer dans les projets. Et pour que pareille démarche de lutte contre la déforestation via la REDD+ puisse correspondre aux priorités de développement social et économique des pays, en particulier en Afrique subsaharienne, il est indispensable de mettre en place de mesures d'accompagnement - un défi de taille.
Le Burkina Faso, où la biomasse et l'agriculture sont les plus grands facteurs d'émissions de gaz à effet de serre, est déjà allé assez loin dans le processus. La gestion communautaire occupe en effet une grande place dans la mise en œuvre de la REDD+, facilitée également par l'importance que le pays accorde à l'inclusivité et à l'équité. Résultat : les communautés locales adhèrent davantage aux projets déployés sur le terrain.
Le Burkina Faso envisage donc d'accélérer sa transition vers l'agriculture durable et l'inclusion des communautés locales. Le mécanisme d'intégration des communautés locales a d'ailleurs est déjà en place depuis 2014. Mais cela ne suffit pas, car les grandes orientations en matière de lutte contre le changement climatique climatiques sont impulsées au niveau des décideurs politiques. Raison pour laquelle le Ghana a décidé de mettre quant à lui l'accent sur la volonté politique, accompagnée cette fois d'un renforcement des capacités de la population et de toutes les parties prenantes.