L'Afrique est à l'aube d'une transformation économique sans précédent, et le Royaume-Uni doit s'engager dans un « partenariat pour le changement », a déclaré, mardi à Londres, le président de la Banque africaine de développement Akinwumi Adesina, en ouverture du symposium des parlementaires britanniques. « L'Afrique du 21e siècle est très différente. Cette Afrique est inédite, plus sûre d'elle », a-t-il plaidé.
Le symposium, co-organisé par le Groupe parlementaire multipartite pour l'Afrique, la Royal African Society, l'université Oxford Brookes et le Trade Justice Network (Réseau pour le commerce juste), a abordé la question des échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l'Afrique à l'ère du Brexit.
Selon le président de la Banque, l'Afrique et le Royaume-Uni pourraient devenir des partenaires commerciaux de premier plan. « Mais la réalité est autre : les échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l'Afrique sont en recul. En 2012, ils ont culminé à 49 milliards de dollars américains, avant d'amorcer une baisse, ne représentant plus que 30,6 milliards en 2018 », a-t-il noté.
Le repli de ces échanges commerciaux et des investissements en Afrique intervient alors que des prévisions évaluent à 5 600 milliards de dollars les dépenses de consommation et les investissements des entreprises d'ici à 2020, et à 1 000 milliards de dollars la valeur du marché de l'alimentation et de l'agriculture d'ici à 2030 en Afrique. « Que nous ayons cette conversation ici, au sein du Parlement britannique, est un excellent début, a poursuivi le président Adesina. Et ce Sommet convoqué par le Premier ministre Boris Johnson, ouvre des perspectives encore plus prometteuses. »
Lors de son intervention devant la Chambre des Communes, le président de la Banque a souligné les perspectives d'investissement en Afrique, « qui parlent d'elles-mêmes ». Les activités commerciales dans le cadre de l'accord de libre-échange sur le continent africain débuteront en juillet prochain : il s'agit d'un marché de plus de 1,3 milliard de personnes et un produit intérieur brut de 2 500 milliards de dollars américains, soit la plus grande zone de libre-échange au monde depuis la création de l'Organisation mondiale du commerce.
Plus tôt dans la matinée, à l'occasion du Forum sur les infrastructures durables, dans le cadre du Sommet sur les investissements Royaume-Uni-Afrique, Akinwumi Adesina a déclaré : « la réalisation d'investissements dans des infrastructures de qualité et durables peut stimuler la transformation économique de l'Afrique. »
Ce Forum, organisé par le ministère britannique du Développement international (DFID) et le Commissaire au service de Sa Majesté, chargé des échanges commerciaux avec l'Afrique, entend faciliter de nouveaux investissements et de nouvelles opportunités commerciales pour le Royaume-Uni, et promouvoir des infrastructures de qualité en vue de fournir de meilleurs services aux citoyens africains.
La Banque africaine de développement fait figure de précurseur pour combler rapidement le déficit d'infrastructures du continent, une demande que le président Adesina interprète comme « l'occasion à saisir en Afrique ». Les investisseurs, qui ont su exploiter très tôt cette demande en infrastructures des technologies de l'information et de la communication en Afrique, ont constaté combien leurs investissements avaient pu changer la donne sur le continent, a-t-il souligné.
« Il y a à peine vingt ans, l'Afrique comptait moins de téléphones que Manhattan à New-York. Aujourd'hui, l'Afrique compte plus de 440 millions d'abonnés à la téléphonie mobile. Les infrastructures numériques sont incroyablement rentables, surtout avec le déploiement actuel du haut débit sur l'ensemble du continent pour dynamiser la connectivité et améliorer les services », a-t-il expliqué.
La Banque est un investisseur majeur dans les infrastructures électriques, de transport et d'eau en Afrique. Ses financements ont augmenté de 22% entre 2016 et 2017, passant de 66,9 à 81,6 milliards de dollars américains. Sur la même période, la valeur de ces projets, auxquels participe le secteur privé, a grimpé de 3,6 à 5,2 milliards de dollars.
Les participants britanniques au Forum auront compris que, pour satisfaire les besoins d'infrastructures de l'Afrique, il faut lancer des projets. Ainsi, la Banque a mis en place plusieurs dispositifs pour pallier le manque de projets bancables et constituer un portefeuille substantiel de projets. Ces dispositifs contribueront à hauteur de 30 à 50 millions de dollars, chaque année, dans ce cadre.
La Banque et le DFID étudient comment mieux soutenir les États fragiles confrontés à d'énormes besoins de financement. Le DFID est le principal partenaire stratégique de la Banque depuis son adhésion au Groupe en 1983. Et son engagement « fort et cohérent » au profit du Fonds africain de développement (FAD) a contribué au développement des États à faible revenu, notamment les plus fragiles.
Des mécanismes produisent des résultats remarquables : c'est le cas du dispositif de renforcement du crédit au secteur privé, un outil de participation au crédit risqué du FAD, ou le guichet concessionnel du FAD lui-même destiné à soutenir des opérations non souveraines dans les pays à faible revenu.
Grâce aux 500 millions de dollars de garanties de crédit fournies par le FAD, la Banque a pu mobiliser 2,5 milliards de dollars de financements au profit des États fragiles, avec un taux de défaut de remboursement nul. « Nous nous engageons à mettre en place des infrastructures de qualité et à veiller à ce que personne ne soit laissé pour compte ! », a conclu Akinwumi Adesina.
Le président de la Banque africaine de développement se trouve actuellement au Royaume-Uni pour une visite de 3 jours. Après avoir participé à un panel présidentiel lors du Sommet sur les investissements Royaume-Uni-Afrique convoqué par le Premier ministre Boris Johnson, il s'est rendu avec les chefs d'État africains à une réception au palais de Buckingham.
Contact:
Nafissatou Ndiaye Diouf, Département de la communication et des relations extérieures, Banque africaine de développement