Le village de Tsakhuma, situé dans le district de Vhembe, dans la région du Limpopo en Afrique du Sud, est bien la preuve que les communautés locales sont capables de trouver des solutions à leurs problèmes. Comme dans beaucoup de zones rurales d'Afrique du Sud, les habitants de Tsakhuma manquaient d'eau pour se baigner, cuisiner, se laver ou accomplir leurs tâches ménagères et autres besoins quotidiens et c'était aux filles et aux femmes du village qu'incombaient la corvée d'aller chercher de l'eau.
« Dans tout Tsakhuma, il y avait une pénurie générale d'eau », se rappelle Florence Negondeni, une habitante du village. « Les coupures d'eau pouvaient parfois durer des semaines entières », raconte-t-elle.
D'après Florence, le problème a commencé à se poser lorsque les autorités locales du district ont installé à Tsakhuma un nouveau réseau de distribution d'eau sans consulter les membres de la communauté. Ce réseau était dépourvu d'un plan de maintenance et ses pannes contribuaient à aggraver les pénuries d'eau. Exaspérée par cette situation, Florence s'est mise à étudier l'histoire de la communauté et de la région en quête de pistes qui permettraient d'avoir un approvisionnement en eau plus sûr. Les pénuries « m'ont fait penser à ces anciennes sources dans les montagnes où nos ancêtres allaient chercher de l'eau », raconte-t-elle.
Dans les montagnes voisines, les villageois ont découvert plusieurs sources. Après avoir analysé le coût du matériel nécessaire pour approvisionner le village en eau à partir de ces sources, ils se sont cotisés pour se le procurer et mettre en place leur propre réseau de distribution d'eau.
La Facilité africaine de l'eau, un fonds hébergé et géré par la Banque africaine de développement, a appuyé la création de ce réseau communautaire, qui a plus d'un an de réserves d'eau, pour un coût d'environ 7 850 dollars américains. Cette somme a été recueillie auprès des 113 foyers du village. « Les membres de la communauté cotisent 20 rands par mois chacun (environ 1,50 dollar américain) pour entretenir les canalisations et assurer leur bon fonctionnement », explique Florence.
La Commission sud-africaine de recherche sur l'eau (WRC), qui finance, facilite et assure la diffusion de travaux de recherche sur des innovations dans le domaine de l'eau, a invité Florence à présenter son projet. Depuis, la Commission s'est mise à mobiliser des financements pour lancer des initiatives similaires. De ce fait, Tsakhuma compte désormais onze groupements communautaires, dirigés par des femmes, qui assurent à 4 000 personnes un approvisionnement en eau destiné à une multitude d'usages.
« Tsakhuma est un modèle de solutions à base communautaire en matière d'approvisionnement en eau dans les zones rurales et périurbaines », commente Omari Mwinjaka, coordinateur de la Facilité africaine de l'eau à la Banque africaine de développement. « Nous collaborons avec différents partenaires pour mettre en œuvre, développer à plus grande échelle et reproduire ce modèle dans d'autres régions d'Afrique. »
La Facilité africaine de l'eau a versé 1,45 million de dollars américains de subventions à la Commission de recherche sur l'eau pour qu'elle réalise une évaluation des avantages qu'apporte la planification par les communautés de l'utilisation des ressources en eau. Des fonds seront également affectés à la mise en place de systèmes de distribution d'eau à usage multiple dans six villages des districts de Vhembe et de Sekhukhune, au Limpopo, qui font partie des plus pauvres du pays.
La Facilité africaine de l'eau (FAE), créée en 2004, est intégralement détenue et gérée par l'Afrique. Elle constitue un mécanisme unique en matière de préparation de projets en Afrique exclusivement axé sur le secteur de l'eau et de l'assainissement. Depuis 2006, la FAE a financé 119 projets d'un montant de 167 millions d'euros à travers le continent et mobilisé plus de 1,5 milliard d'euros d'investissements dans le secteur.
« L'un des objectifs de la Facilité africaine de l'eau est d'effectuer des investissements modestes mais à effet catalyseur, ou d'apporter un financement de départ à des projets qui peuvent être reproduits ou gérés grâce à des modèles de fonctionnement et à des technologies innovants ou alternatifs dont le but est d'aider les communautés, notamment les femmes et les enfants, à améliorer leur qualité de vie, à créer des emplois et à réduire le retard de croissance chez les enfants », explique Wambui Gichuri, vice-présidente par intérim chargée de l'Agriculture et du développement humain et social au sein du Groupe de la Banque africaine de développement.