70% des pays les plus vulnérables aux changements climatiques se trouvent sur le continent
Engagée aux côtés de ses pays membres régionaux (PMR) dans leur lutte contre les effets négatifs du changement climatique, la Banque africaine de développement les exhorte à construire des infrastructures adaptées et résilientes aux chocs climatiques.
L'Afrique a perdu des infrastructures de plusieurs milliards de dollars et des milliers de personnes ont péri à la suite du passage du cyclone Idai, qui a frappé en 2019 le Mozambique, le Zimbabwe et le Malawi, et de la tempête Kenneth, la même année, aux Comores et à Madagascar.
Du Sénégal au Soudan, en passant par la Côte d'Ivoire, le Niger, le Mali et le Tchad, des inondations dues aux effets du changement climatique ont entraîné, en 2020, des centaines de morts et des milliers de déplacés internes au Sahel.
Pour la Banque africaine de développement, première institution multilatérale de financement du développement sur le continent, l'Afrique peut atténuer les conséquences des chocs climatiques ‑‑cyclones, tempêtes tropicales, inondations, sècheresses‑‑ en construisant des infrastructures plus résilientes et en renforçant les mécanismes d'alerte précoce et de veille climatique.
En amont, la Banque encourage ses PMR à intégrer la dimension « choc climatique » dans la construction d'infrastructures essentielles et coûteuses comme les routes, ponts, gares, barrages et aéroports.
« Il nous faut bâtir des infrastructures résilientes aux chocs climatiques, confirme Al-Hamadou Dorsouma, chef de la Division climat et croissance verte à la Banque. C'est un enjeu d'autant plus important que ces destructions se chiffrent en milliards de dollars. »
« Si ces infrastructures avaient été construites sur un schéma de résilience climatique, elles auraient mieux résisté aux cyclones, tempêtes et inondations », constate-t-il.
Et M. Dorsouma d'ajouter : « Il est important pour l'Afrique dont les futures infrastructures sur un horizon de 50 ans ne sont pas encore construites, de renforcer sa résilience et sécuriser ses investissements dans ce secteur. »
Systèmes d'alerte précoce
En aval, la Banque encourage les États africains à mettre en place des mécanismes nationaux et sous-régionaux d'alerte précoce afin d'anticiper les événements climatiques. En effet, l'alerte précoce permettrait d'évacuer à l'avance les populations et de sauver des vies humaines, tout en se préservant des pertes et dommages liés au climat.
En l'absence de ces systèmes d'anticipation, le cyclone Idai a fait au moins mille morts au Mozambique alors que les inondations au Sahel ont fait plus de 200 victimes et entraîné le déplacement de plus d'un million de citoyens.
La Banque participe ainsi activement à la mise en place de systèmes d'alerte précoce en Afrique par le renforcement des capacités en équipements et en ressources humaines des services nationaux de météorologie et des centres climatiques régionaux, y compris le Centre africain pour les applications de la météorologie au développement (AMMAD) et le Centre régional de formation et d'application en agro, hydrologie et météorologie (AGRYMET) basés à Niamey, au Niger.
Le Centre de prévisions climatiques de l'Autorité intergouvernementale des pays d'Afrique de l'Est (ICPAC) basé à Nairobi, le Centre d'application et de prévision du climat de l'Afrique centrale (CAPC-AC) à Douala, et le Centre de services climatiques de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC-CSC) basé à Gaborone bénéficient également de cet appui.
Plan d'action ambitieux
La construction d'infrastructures résilientes fait partie d'une démarche plus globale de la Banque inscrite dans son Plan d'action pour les changements climatiques sur la période 2016-2020, qui privilégie l'adaptation et l'atténuation des effets du changement climatique.
Le Fonds spécial ClimDev-Afrique (FSCD), logé au sein de la BAD et financé en partenariat avec l'Agence suédoise pour la coopération au développement et le Partenariat entre le Groupe des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) et de l'Union européenne, a investi 36 millions d'euros pour moderniser les réseaux d'observation du climat et du temps en Afrique.
Ces réseaux de centres climatiques régionaux (CCR) fournissent un accès aux données satellitaires et des prévisions météorologiques et climatiques fiables et opportunes. Le Fonds a investi 20 millions d'euros dans les CCR afin de remédier au manque d'accès aux informations climatiques et météorologiques, avec des implications pour le développement durable et la croissance verte.
Nairobi abrite le Centre de prévision et d'applications climatiques de l'IGAD, (ICPAC) qui dessert onze pays de la Corne de l'Afrique. Le Fonds a doté l'ICPAC de superordinateurs pour lutter notamment contre la pire épidémie de criquets pèlerins en 25 ans dans la Corne de l'Afrique.
À Niamey, le Centre africain d'application météorologique pour le développement (ACMAD) travaille à renforcer la capacité de prévision des conditions météorologiques extrêmes. Le Centre AGHRYMET travaille, lui, avec treize des seize pays d'Afrique de l'Ouest à des collaborations avec les agences nationales de météorologie et de gestion des risques de catastrophe.
À Douala, le Centre d'application et de prévision du climat de l'Afrique centrale (CAPC-AC) aide les membres de la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC) à renforcer leurs capacités face aux catastrophes et à renforcer celles des institutions régionales et nationales à utiliser les données des modèles de prévisions météorologiques pour les produits d'alerte précoce.
À Gaborone, le Centre de services climatiques de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC-CSC) aide les pays de la région à atténuer les effets des chocs climatiques (inondations, sécheresse, cyclones) et de l'élévation du niveau de la mer.
Ces cinq centres alimentent l'accès de l'Afrique aux services d'information sur le climat et la météo, renforçant la résilience du continent grâce à une meilleure capacité de gestion des risques de catastrophe. « Les impacts du changement climatique sont déjà là. L'urgence est de faire en sorte d'en limiter les effets pour les pays africains. Je souligne qu'avec seulement 4% d'émission de gaz à effet de serre, l'Afrique n'est pas un grand pollueur mais souffre considérablement des effets de ce phénomène », souligne Al-Hamadou Dorsouma.