Transformer la crise en opportunité : comment deux entrepreneuses zimbabwéennes développent des entreprises florissantes ?
Lorsque la pandémie de Covid-19 a paralysé une grande partie du monde, Yollanda Mambeu a décelé une opportunité dans la crise. Dans un contexte de confinement strict qui a contraint d'innombrables entreprises à fermer leurs portes, elle a lancé l'entreprise de ses rêves : une pâtisserie dans une banlieue densément peuplée de Mutare, la troisième plus grande ville du Zimbabwe.
Depuis, ses fours ont rarement refroidi. Ce qui n'était au départ qu'une modeste entreprise de pâtisserie s'est transformé en une entreprise florissante. Aujourd'hui, Mme Mambeu fournit une gamme variée de produits et d'accessoires de pâtisserie, allant des ustensiles et épices pour la confection de gâteaux aux supports pour ballons, en passant par les décorations de gâteaux et l'impression d'images comestibles. Elle propose également des cours de pâtisserie aux aspirants entrepreneurs âgés de 20 à 40 ans dans les petites villes autour de Mutare.
Mme Mambeu réalise aujourd'hui un bénéfice mensuel moyen de 4 000 dollars, avec des pics pouvant atteindre 5 000 dollars pendant les jours fériés et les périodes de fête. Elle attribue son succès à la formation reçue dans le cadre du projet « Développement d'entreprises durables pour les femmes et les jeunes -- Croissance des entreprises pour les jeunes entrepreneurs », financé par la Banque africaine de développement. Ce programme, qui promeut l'entrepreneuriat et la création d'emplois, a profité à 984 bénéficiaires à ce jour, dont plus de 68 % de femmes.
Mme Mambeu a participé à deux programmes de formation clés : « Entreprise durable et résiliente » et « Améliorez votre entreprise », tous deux financés par le Fonds fiduciaire multidonateurs pour l'entrepreneuriat et l'innovation des jeunes de la Banque et dispensés par l'Organisation internationale du travail en partenariat avec le gouvernement du Zimbabwe.
« Avant la formation, j'avais des difficultés en matière de visibilité sur le marché et de stratégie de marque, a-t-elle déclaré. J'ai appris à positionner mon entreprise, et désormais tout porte le logo de l'entreprise, des vitrines aux réfrigérateurs. Les gens savent immédiatement ce que nous proposons. Ce changement a stimulé nos bénéfices mensuels, qui sont passés de 1 000 à 4 000 dollars ».
En janvier 2024, Mme Mambeu a officiellement immatriculé son entreprise sous le nom de Yoyo's Yummy Cakes and Baking Supplies et a commencé à en faire la publicité à la radio locale. La stratégie a porté ses fruits : en septembre, sa clientèle avait quadruplé pour atteindre 1 200 clients.
Sa marque en plein essor a attiré l'attention de grandes entreprises. L'un des plus grands producteurs de lait du Zimbabwe l'a nommée ambassadrice de la marque et lui fournit du lait de pâtisserie. Elle fournit désormais des confiseries à une banque commerciale, à l'administration fiscale nationale et à une ONG locale, entre autres clients. Pour répondre à la demande croissante, elle a investi 2 500 dollars dans du matériel de pâtisserie industriel et prévoit d'ouvrir une boulangerie et un point de vente en gros.
L'histoire de Mme Mambeu fait écho à celle de Violet Mhute, une entrepreneuse de 44 ans basée à Bulawayo, la deuxième plus grande ville du Zimbabwe. Comme Mme Mambeu, elle a bénéficié d'une formation financée par la Banque, cette fois pour aider les entrepreneuses à pénétrer le secteur du cuir, dominé par les hommes.
Mme Mhute a fondé Soko Genuine Leather en 2008, avec au départ des difficultés à s'imposer dans le secteur du cuir au Zimbabwe, estimé à 32 millions de dollars. Pendant des années, elle a exporté des peaux semi-transformées vers l'Afrique du Sud et le Royaume-Uni, sans grand profit. Aujourd'hui, son entreprise propose un catalogue d'articles en cuir de haute qualité (chaussures, sandales, portefeuilles et ceintures) vendus dans toute l'Afrique et au-delà.
« Pénétrer l'industrie du cuir en tant que femme a été difficile. Obtenir les bonnes informations a été un combat permanent, a déclaré Mme Mhute. Mais la formation m'a donné les outils et la confiance nécessaires pour relever ces défis. »
Grâce au soutien de la Banque africaine de développement et aux politiques gouvernementales favorisant la création de valeur ajoutée locale, Mme Mhute est passée de l'exportation de matières premières à la vente de produits finis haut de gamme. Ses produits sont désormais certifiés par la Standards Association of Zimbabwe, ce qui lui permet de participer à des salons internationaux et de conquérir de nouveaux marchés, notamment dans la région de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) et au Royaume-Uni.
Elle a également reçu une formation sur la manière de développer son activité dans le cadre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf). L'impact a été significatif : les bénéfices mensuels sont passés de 800 à 3 100 dollars.
Mme Mhute déclare qu'elle emploie désormais cinq jeunes dans son entreprise de maroquinerie en pleine croissance.
Martha Phiri, directrice du Capital humain, de la Jeunesse et du Développement des compétences à la Banque africaine de développement, explique que les réussites de Mme Mambeu et Mme Mhute reflètent l'engagement soutenu de la Banque en faveur du développement du secteur privé, en particulier des micros, petites et moyennes entreprises (MPME).
« Ces efforts donnent la priorité à l'inclusion, avec un soutien ciblé pour les groupes défavorisés tels que les femmes et les jeunes, garantissant un accès équitable aux ressources et aux opportunités, a souligné M. Phiri. Grâce aux initiatives de la Banque, nous autonomisons les entrepreneures en leur fournissant une assistance technique, une formation professionnelle et un soutien au développement d'entreprise. »
Mme Mambeu et Mme Mhute se disent optimistes quant à l'avenir et entendent développer davantage leurs entreprises tout en créant des emplois pour les autres.
« Mon rêve va au-delà du développement de mon entreprise, a déclaré Mme Mhute. Je veux créer un institut d'entrepreneuriat qui aidera d'autres personnes à surmonter les obstacles dans les secteurs dominés par les hommes, comme je l'ai fait. »
Depuis son lancement en 2017, le Fonds fiduciaire multidonateurs pour l'entrepreneuriat et l'innovation des jeunes a été un catalyseur clé pour des entrepreneurs comme Mambeu et Mhute. Le fonds soutient la stratégie « Des emplois pour les jeunes en Afrique » de la Banque africaine de développement, en accordant des dons pour autonomiser les start-up et les MPME dirigées par des jeunes et opérant dans les secteurs formel et informel.