Depuis 2021, le gouvernement ivoirien accélère sa politique de travaux publics routiers et autoroutiers. Secteur privilégié depuis 2011, le BTP routier est toujours au centre de la stratégie de développement ivoirienne. Le Plan national de développement (PND) 2021-2025, dévoilé le 15 juin dernier, entend le maintenir dans ses priorités. Etat des lieux.
Avec plus de 82 000 kilomètres de routes, dont 7 500 km bitumées et près de 250 km autoroutières, la Côte d'Ivoire dispose du réseau le plus dense d'Afrique de l'Ouest. A lui seul, le pays concentre 50% des routes de l'Union économique et monétaire ouest-africaine.
Un réseau routier dense et entretenu porte des enjeux logistiques et économiques lourds. C'est un prérequis catégorique pour fluidifier les mobilités internes ou avec l'étranger proche. L'objectif final recherché étant de créer des conditions favorables pour attirer investissements et entreprises. Une réalité qui semble avoir été prise en compte de manière précoce par le président Ouattara.
Entamée en 2012, la politique de grands travaux routiers s'est matérialisée au sein des grands programmes de développement qui ont marqué la décennie 2010 : le programme de renaissance des infrastructures (PRICI), le programme d'Entretien routier 2018-2020 ou bien les PND 2016-2020 et 2021-2025. Elle semble connaître une accélération depuis 2021.
Un blanc manteau autoroutier
Abidjan affiche des objectifs ambitieux. Le gouvernement vise la construction de 1 500 km d'autoroutes à l'horizon 2030, dont 500 km d'ici 2023. La modernisation du reste du réseau routier devrait aussi s'accélérer pour atteindre les 9 500 km de voies goudronnées d'ici la fin de l'année prochaine. Plusieurs projets sont venus concrétiser cette vision.
On peut ainsi citer le programme de construction et de réhabilitation de l'autoroute « La Côtière » (370 km). Lancée en 2020, elle doit relier Abidjan à la ville portuaire de San Pedro à l'ouest du pays. Plus récemment, en mai 2022, le président Alassane Ouattara officialisait la participation de la Côte d'ivoire au grand projet d'autoroute devant relier Abidjan à Lomé, via le Ghana. Un projet ayant reçu le soutien, et le financement (15,6 milliards de dollars), de la Banque africaine de développement (BAD).
D'autres plans sont à l'étude au sein du ministère de l'Equipement et de l'entretien routier. L'autoroute du nord pourrait être prolongée de 250 km afin de relier la ville de Bouaké à Ouagadougou, capitale du Burkina-Faso. Un autre axe, à l'est, qui relierait notamment les villes de Doropo et Bouna, serait aussi envisagé. L'idée sous-jacente est donc de relier les grandes agglomérations nationales, ainsi que les capitales voisines.
A noter que la construction de l'axe Yamoussoukro-Tiébissou-Bouaké devrait être achevée d'ici la fin de l'année 2022.
La problématique du financement
En 2022, le budget du ministère de l'Equipement et de l'Entretien routier a été rehaussé à plus d'un milliard d'euros ; contre 950 millions en 2021. Il n'en demeure pas moins que la construction ou la réfection des routes représente un coût élevé pour l'Etat ivoirien. Ainsi selon le ministre Amédé Koffi Kouakou, la bétonisation d'un kilomètre de route coûterait autour de 1 500 000 euros (Un milliard FCFA), et le double pour un kilomètre d'autoroute. Cela sans compter les 150 millions d'euros de coûts d'entretiens par an, pour l'ensemble du réseau.
C'est pourquoi la plupart de ces projets font l'objet de co-financements entre l'Etat ivoirien et des bailleurs de fonds internationaux (Banque Mondiale, Agence Française de Développement, Banque Africaine de développement, etc). Mais ces prêts doivent être progressivement remboursés. Raison pour laquelle la contribution des citoyens ivoiriens, via les péages, est particulièrement importante pour rentabiliser le réseau sur le long terme. Une réalité qu'a récemment rappelé le ministre Kouakou lors d'une conférence de presse.
Investissements étrangers
Les différents programmes routiers provoquent un ruissellement sur toute la filière BTP ivoirienne. La construction de routes, outre le gros œuvre, implique également des travaux connexes tels que le déploiement de signalétiques (feux, panneaux, etc), la construction de ponts, de postes de péages (et leur gestion) ou encore d'ouvrages d'art. Sans oublier les travaux d'entretiens.
Les opportunités pour le secteur privé sont donc importantes. Aussi bien pour les entreprises ivoiriennes, bien installées, qu'étrangères. Ces dernières viennent du Maroc, d'Egypte voire du Burkina-Faso ; mais on note surtout une forte présence d'acteurs français. L'agence Business France, qui accompagne les PME françaises dans leurs investissements à l'étranger, soulignait à ce titre, en 2021, les atouts du secteur BTP ivoiriens. L'agence y encourage notamment les partenariats avec les entreprises locales, considérées comme compétitives.
En définitive, la montée en puissance des infrastructures de transport ivoiriennes est à ce stade un succès sur de nombreux plans. Progressivement, la bitumisation permet le désenclavement du territoire national, et la circulation des biens et des personnes. De plus, les raccordements internationaux (Lomé, Ouagadougou, etc.) devraient favoriser les échanges commerciaux interafricains : trop souvent négligés à l'échelle continentale. C'est enfin le secteur BTP lui-même qui se trouve dynamisé pour devenir un véritable vecteur de croissance. Celui-ci, avec 5,3% de contribution au PIB national, peut d'ailleurs se prévaloir d'un rang important.